Concorde

[JumpSeat]

Dans ce test nous en avons une sur le record NY Paris
http://www.ouest-france.fr/leditionduso ... 656/page/6

Si le copilote de l'époque pouvait nous faire un petit résumé de ce vol qu'il m'avait fait un jour c'est passionnant.

Merci à lui

[didier le chaton]

bonjour Chef !

tu tapes record concorde
et Google est ton ami
tu peux choisir le texte qu'a rédigé le CDB Gérard Duguet qui m'avait demandé si j'avais gardé le PV du vol :
je lui ai répondu " a pas peur ! c'est gravé dans mon cerveau "
il l'a remodelé à sa manière et je trouve cela très bien

bonne lecture

ps : pour info le texte pour " Les Vieilles Tiges " est le meilleur

[Spoutnick]

Google est mon ami mais il est facétieux. Le premier lien est celui-ci :

http://www.concorde.fr/Sexshop



Spoutnick

[DC8]

tiens pour ceux qui veulent comprendre la difference entre un Concorde et leur avion de tous les jours en 5 minutes .
http://museedelta.free.fr/concorde/paris_ny.htm

le texte des vieilles tiges dont Didier LC parlait est ici :
http://www.vieillestiges.com/HistoireRe ... corde.html

Ai eu l'occasion de faire 4 vols transatlantiques en Concorde, tous les 4 en poste/jumpseat du debut a la fin. Tous avec BA. inoubliables moments. Avion unique dont rien de similaire ne volera probablement jamais plus .

[JumpSeat]

L'Officier Pilote Didier Le Chaton excusera mon copié collé:

New York, 24 décembre1989, 13 heures 10 (heure locale), 19 heures 10 (heure de Paris)

Le Concorde New York / Paris s'aligne sur la piste 13 de l'Aéroport John Fitzgerald Kennedy, avec seulement 30 passagers à bord (traditionnellement la veille de Noël il y a peu de passagers dans les avions, à partir de midi de nombreux vols sont annulés par les Compagnies Aériennes... il faut laisser l'espace au Père Noël).
À la préparation du vol, les conditions météorologiques sont prévues excellentes sur tout le parcours, avec un vent très favorable. De plus l'équipage sait que le trafic aérien de New York est très réduit. Toutes les conditions sont réunies pour "faire un temps". Le record officiel est de 3 heures 15 (Cdt Andréani), ce temps a été très souvent égalé ou battu, mais non homologué, le temps de vol devant être chronométré par la Fédération Aéronautique Internationale, le record "officieux" étant de 3 heures 02.

La zone militaire à l'Est de New York est inactive (pas de guerre prévue le jour de Noël), le vol direct vers le 60° Ouest est autorisé par le Contrôle de New York, ceci sans restriction d'altitude ou de vitesse.
Après le décollage et la procédure anti-bruit (abattée de cap vers le Sud après décollage), montée directe et accélération vers Mach 2.00, pendant la montée, la température extérieure est plus froide que la "standard", ce qui est favorable pour le temps de montée (la poussée des réacteurs étant meilleure). Dès 30.000 pieds le fort vent arrière prévu et espéré est bien là ! La tropopause est relativement basse (vers 33.000 pieds) le Mach de croisière est rapidement atteint à 50.200 pieds, la température extérieure est maintenant plus chaude que la standard, ce qui augmente la célérité du son (qui est directement lié à la racine de la température absolue). Ceci est un facteur favorable… À 51.000 pieds le vent arrière est de plus de 100 nœuds, la vitesse par rapport au sol de 1260 nœuds.
Le Commandant décide d'abandonner la "croisière ascendante" (vol à Mach 2.00 avec la poussée croisière maximum, ce qui conduit le Concorde à monter lentement au fur et à mesure de la consommation kérosène), ce choix afin de conserver ce vent bénéfique.

L'altitude est maintenue entre 51.000 et 53.000 pieds et la vitesse de M 2.02 est choisie au lieu de M 2.00… La vitesse sol obtenue variera de 1260 à 1300 nœuds, il sera nécessaire par moments de réduire le mach de croisière pour respecter la température d'impact à 127 ° C (maximum autorisé). La progression du vol est satisfaisante et l'objectif de 3 heures semble être à portée.
L'Officier Pilote surveille les météos de Shannon et de Paris, calcule les points de "non-retour" et les "points milieu" sur 4 et 3 moteurs... Tout est dans le vert ! Chaque seconde compte, le Commandant décide de changer de route et d'éviter Guernesey, qui est le point "classique" d'entrée pour le Concorde, mais qui oblige à réduire précocement la vitesse afin d'être subsonique 50 km avant l'île.
Le vol est recalé pour entrer en France par Dieppe en se faufilant entre l'Angleterre et Cherbourg, ce qui allonge le trajet, mais permet de conserver Mach 2 plus longtemps (gain d'environ 2 minutes). Descente lente vers 50.000 pieds pour conserver le vent arrière le plus longtemps possible, le point de décélération est soigneusement calculé, il faut être impérativement à Mach 1.00 à 50 km de Dieppe pour que le bang sonique percute seulement la mer et les poissons. Le vol est poursuivi à Mach 0.97 et 31.000 pieds, l'objectif de 3 heures devient "tangent".

L'Officier Pilote contacte Charles de Gaulle Approche, nous obtenons une arrivée directe en piste 10, avec liberté de manoeuvre. Pour grappiller quelques secondes et retarder la décélération il est décidé de descendre avec 2 "reverses" intérieures coquilles ouvertes (utilisation certifiée, Concorde n'est pas un Boeing 747 !), la vitesse verticale devient 14.000 pieds minutes à 370 noeuds.
Il devient évident que les 3 heures vont être dépassées de quelques secondes. Le Commandant demande à atterrir sur la. piste 09 (son seuil est plus à l'ouest d'environ 2 km), quelques précieuses secondes sont gagnées, Concorde 001 touche des roues après 2 heures 59 minutes et 40 secondes..., à 22:09:40 avec 25 minutes d'avance sur l'horaire.

Depuis, ce temps n'a jamais été atteint, ni même approché, en effet les circonstances de ce vol (nuit de Noël, vent, météo, collaboration des services de contrôle...) ont peu de chance de se reproduire, d'autre part la route "Dieppe" a été supprimée depuis de nombreuses années suite à l'encombrement des routes aériennes, ce qui rend désormais impossible de battre ce record "officieux".

Il faudra maintenant attendre le successeur de Concorde qui sans doute tombera ce record d'une vingtaine de minutes à Mach 3.00 !

Équipage de ce vol :

Commandant de Bord : Gérard Duguet
Officier-Pilote Didier : Le Chaton
Ingénieur-Mécanicien : André Lavillaureix.

[Christophe_O]

il fait rêver ce texte.........

Ça fait longtemps que je n'avais pas lu de "résumé" de vol, d'un vol commercial "occidental", rédigé par des pilotes, et non pas par des gestionnaires de système volant

Ça fait plaisir!!

[didier le chaton]

la petite histoire veut qu' après le débarquement des passagers on a voulu arroser ça avec les PNC ( une demi heure d'avance ! ça n'est pas très souvent !)
réponse du CC : oh ben non , on va profiter qu'on est en avance pour rentrer chez nous plus tôt , puisque c'est Noel !!

du coup avec le CDB on a pris une bouteille de Champagne et on a été arroser ça avec le gars de permanence au planning qui, lui , était ravi !
une bouteille pour 4 , ça va ?

[JumpSeat]

C'est raisonnable en effet...

[Arcimboldo]

Une bouteille pour cinq car Didier a omis de signaler qu'avec eux trinquait Modération.

Bravo Didier pour ce texte d"'aviateur" !

Arcim

[didier le chaton]

Merci Archi
mais je dois dire que travailler avec le CDB Duguet, avec qui j'avais fait mon stage Concorde à Toulouse était un plaisir !
c'est Lui le véritable architecte de cet évènement et je lui serais éternellement reconnaissant de m'avoir permis d'y participer.

[4T60A]

la petite histoire veut qu' après le débarquement des passagers on a voulu arroser ça avec les PNC ( une demi heure d'avance ! ça n'est pas très souvent !)
réponse du CC : oh ben non , on va profiter qu'on est en avance pour rentrer chez nous plus tôt , puisque c'est Noel !!

du coup avec le CDB on a pris une bouteille de Champagne et on a été arroser ça avec le gars de permanence au planning qui, lui , était ravi !
une bouteille pour 4 , ça va ?

Ah, ces chers PNC.... Je ne veux pas les critiquer, mais parfois les bras m'en tombent.. Ça me rappelle une fois, où, à la belle époque quand mon employeur avait le bon goût de desservir la Californie, sur un retour LAX ou SFO de nuit nous admirions une aurore boréale tellement magnifique que nous avions appelé au cockpit les PNC dispos pour qu'ils partagent ce spectacle grandiose avec nous. Jusqu'au moment où une hôtesse, avisant le spectacle, nous dit "Ah oui, j'ai déjà vu ça à la TV" et tourne les talons aussi sec.

J'avoue que j'en suis resté sans voix jusqu'à la fin du vol. Même si maintenant j'en rigole...

[Bobcat]

C'est pour cela que je dis toujours :

"Certains ont un métier, d'autres ont un travail"......

[Hotel Echo]

Ce vol me revient en mémoire, car j'étais effectivement en charge du secteur TP (arrivée par DPE) cette nuit du 24 décembre 1989.
Il est exact qu'au niveau du contrôle, nous nous sommes pris au jeu et avons fait le maximum pour répondre aux souhaits de l'équipage, en vue de battre ce record. Bon souvenir

[didier le chaton]

hotel echo
effectivement le contrôle a été des plus coopératif ( comme à peu près toujours avec " le bel oiseau "

le changement de piste en dernière minute pour nous faire gagner 30 secondes en nous donnant la piste Nord au lieu de la Sud habituelle en est l'aspect le plus révélateur !

ravi de te retrouver l'ami , même si on ne se connait pas

[didier le chaton]

dernière petite anecdote sue ce vol

effectivement le Commandant Duguet avait choisi de sortir de la croisière ascendante et de faire des paliers qui nous permettaient de rester dans le lit du vent et de monter un peu quand on sentait que le vent était sensiblement le même un peu plus haut.
on a fait comme cela des paliers de 500 pieds d'écart.
et pour cela il fallait réduire les moteurs quand le Mach était trop fort ( on est monté comme cela à M 2, 07 quelques secondes avant de réduire à M 2,02 .
On a eu aussi une température qui est montée à 132 °C au lieu des 127 de TMO ( nous savions que cela était malgré tout une limite " douce " tandis que la MMO était une limite dure liée à l'onde de choc dans l'entrée d'air ).

ces limites n'ont été dépassées que le temps de le dire et de réagir, je vous rassure , mais c'était une conduite du vol assez extraordinaire.

[Hotel Echo]

Anecdote au sujet de ce bel oiseau.
Pour l'intégration de cet avion dans le domaine ATC, j'avais participé à un groupe de réflexion, notamment avec les pilotes d'essais. Cela a permis d'établir un document diffusé en 1976 à tous les pays membres de l'IFATCA.

En 1985, je suis missionné en Egypte pour former en 14 mois mes collègues de ce pays à qui nous avions vendu un nouveau système et un centre de contrôle. Je découvre que le Concorde british (Bahrein-Londres) n'est autorisé à commencer son accélération supersonique qu'après Louxor. Je m'en étonne ? Raison invoquée : la défense aérienne égyptienne interdit toute trajectoire directe à travers le désert qui pourrait "empiéter" sur ses zones réservées d'entrainement.
Ma connaissance des nécessités et contraintes ATC de Concorde m'a été d'une grande aide. J'ai réussi à convaincre un collègue égyptien ( excellent contrôleur et chef de service très compétent) que le concorde BAW devait commencer son accélération dès l'entrée sur la côte égyptienne et en route directe sur Alexandrie, afin de ne pas accélérer en virage sur un site historique. Ce collègue a mis plusieurs mois pour convaincre la défense aérienne égyptienne d'accepter enfin une trajectoire directe à travers des zones militaires pour ce vol spécifique.
Petite victoire pour ce vol dont mon collègue égyptien a été un artisan remarquable et nous en avons été fiers tous les deux à l'époque.